Au-delà des prescriptions des articles R.431-5 et suivants du Code de l’urbanisme, le dossier produit par le pétitionnaire doit comporter l’ensemble des informations requises pour permettre à l’administration d’apprécier en toute connaissance de cause la conformité du projet objet de la demande aux normes d’urbanisme lui étant opposables.
CAA. Bordeaux, 26 avril 2011, Sté Erentzin, req. n°10BX01940
Voici un arrêt qui en lui-même n’est pas inintéressant mais qui nous offre surtout un prétexte pour revenir sur ce qui constitue assurément l’une des plus belles « erreurs de communication » de l’administration centrale au sujet de la réforme des autorisations d’urbanisme en vigueur depuis le 1er octobre 2007.
Dans cette affaire, le pétitionnaire avait présenté une demande de permis de construire portant exclusivement sur la construction de logements. Le projet objet de cette demande n’incluait donc aucun « ERP » et, partant, le dossier présenté par le pétitionnaire n’avait pas à comporter le « volet sécurité » et le « volet accessibilité » prévus par l’article R.431-30 du Code de l’urbanisme.
Pour autant, le pétitionnaire avait néanmoins produit à son dossier une notice de sécurité, notamment dédiée à la gestion des risques d’incendie. Toutefois, le Maire devait estimer que cette notice était insuffisante et, sans même avoir préalablement invité le pétitionnaire à la compléter, devait ainsi opposer un refus à la demande motivé par l’article R.111-2 du Code de l’urbanisme ; refus que devait donc valider le Tribunal administratif puis la Cour administrative d’appel de Bordeaux au motif suivant :
« Considérant que la SARL ERENTZIN fait appel du jugement du 3 juin 2010 par lequel le Tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande dirigée contre l'arrêté en date du 11 août 2008 du maire d'Hendaye refusant de lui délivrer un permis de construire ;
Considérant que le contenu du dossier de demande de permis de construire déposé par la SARL ERENTZIN n'imposait pas à la commune d'Hendaye de notifier au pétitionnaire la liste des pièces manquantes ;
Considérant qu'aux termes de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme : Le projet peut être refusé ou n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales s'il est de nature à porter atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique du fait de sa situation, de ses caractéristiques, de son importance ou de son implantation à proximité d'autres installations ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la notice de sécurité jointe à la demande de permis de construire présentée par la SARL ERENTZIN ne donne aucune indication sur l'existence à proximité du terrain d'assiette du projet d'un réseau d'eau et d'une borne incendie ayant un débit suffisant pour assurer la défense contre l'incendie du projet de construction de soixante logements ; que, dans ces conditions, la notice de sécurité jointe à la demande de permis de construire est incomplète, et ne permet pas à l'administration de vérifier si la défense contre l'incendie du projet était assurée ».
Pour autant, comme on le sait, l’administration l’a dit et répété…
Quelles sont les pièces et les informations à fournir au dossier de demande de permis de construire ?
Quel contrôle de la qualité habilitant à construire le pétitionnaire ?
Dès lors que conformément à l’article R.431-5 du Code de l’urbanisme le pétitionnaire a attesté présenter l’une des qualités visées par l’article R.423-1, le moyen tiré de la méconnaissance de cet article ne saurait être utilement invoqué à l’encontre d’un permis de construire (?)
CAA. Lyon 31 mai 2011, Geneviève A, req. n°09LY01225 & CAA. Marseille, 5 mai 2011, req. n°09MA01426
Voici deux arrêts qui offrent l’occasion de revenir sur la portée des dispositions combinées des articles R.423-1 et R.431-5 du Code de l’urbanisme et, concrètement, sur la question du contrôle de la qualité et du titre habilitant à construire le pétitionnaire. Et force est de constater que plus de trois ans et demi après l’entrée en vigueur de ce dispositif, cette question n’est toujours pas clairement tranchée…
Il résulte en effet clairement de l’article R.431-5 du Code de l’urbanisme qu’en dehors du cas particulier où le projet porte pour tout ou partie sur le domaine public, (voir également : CAA. Marseille, 14 avril 2011, Association Sauvons le Business Club, req. n°09MA03433) le pétitionnaire n’a plus aucun document à produire pour établir sa qualité et son titre l’habilitant à construire mais doit seulement attester disposer d’une telle qualité ; cette attestation ayant vocation à être établie par la simple signature du formulaire « CERFA » dont l’imprimé intègre un « attestation type ». Il reste qu’il résulte tout aussi clairement de l’article R.423-1 dudit code que le dispositif en vigueur régit encore les qualités et titres autorisant à obtenir légalement un permis de construire.
De ce fait, deux principales analyses de la portée des dispositions combinées de ces articles sont possibles en cas de contentieux sur ce point, à savoir en substance :
• soit, le juge doit se borner à vérifier si le pétitionnaire a ou non attesté présenter l’une de ces qualités et dès lors que le pétitionnaire l’a effectivement fait le moyen tiré de la méconnaissance de l’article R.423-1 du Code de l’urbanisme est nécessairement voué au rejet ;
• soit, l’article R.431-5 dudit code a dans une certaine mesure généralisé l’ancienne théorie dite du « propriétaire apparent » et ainsi limité la sanction de l’absence du titre habilitant à construire au cas d’une contestation sérieuse sur ce titre et au cas de fraude, ce dernier cas impliquant que le pétitionnaire prouve l’existence du titre dont il a attesté à travers la signature du formulaire « CERFA ».
Certaines, jurisprudence illustrent d’ailleurs l’hésitation qu’il est possible d’avoir en la matière. A titre d’exemple, on peut notamment relever que le Conseil d’Etat a jugé que :
« Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article R. 423-1 du code de l'urbanisme : Les demandes de permis de construire, d'aménager ou de démolir et les déclarations préalables sont adressées par pli recommandé avec demande d'avis de réception ou déposées à la mairie de la commune dans laquelle les travaux sont envisagés : / a) Soit par le ou les propriétaires du ou des terrains, leur mandataire ou par une ou…
Quand la démolition d'une construction ne consiste pas à démolir un bâtiment
Le fait qu’un projet de construction implique la démolition d’un ouvrage existant sur le terrain à construire n’implique pas que le dossier de demande de permis de construire justifie de la demande de permis de démolir requise si cet ouvrage ne constitue pas un bâtiment.
CAA. 31 mai 2011, SCI Bercy Village, req. n°10PA06101
Voici un arrêt récemment mis en ligne sur Légifrance qui pour le coup appelle en lui-même peu de commentaires mais permet de répondre à deux des interrogations générées par la réforme des autorisations d’urbanisme entrée en vigueur le 1er octobre 2007.
Comme on le sait en effet, là où sous l’empire du dispositif applicable jusqu’au 1er octobre 2007, l’ancien article L.430-2 du Code de l’urbanisme ainsi que les articles pris pour application de celui-ci se bornait à viser les bâtiments, les articles L.421-3, R. 421-27 et R. 421-28 visent pour leur part les constructions.
Or, cette terminologie n’est pas sans incidence puisqu’en droit de l’urbanisme la notion de construction est plus large et étendue que celle de bâtiment.
C’est ainsi qu’en application de l’ancien article L.430-2, il avait été jugé que n’étaient pas soumis à permis de démolir les travaux de démolition portant sur des installations qui pour constituer des constructions n’en présentaient pas pour autant les caractéristiques d’un bâtiment (CE. 6 mars 1987, Cne de Champigny-sur-Marne, req. n°46354 ; CAA Paris 2 mars 2004, Assoc. Montsouris Environnement, req. n° 00PA02132 ; TA Versailles 6 novembre 1997, Durand, req. n°97-03456) bien qu’a contrario, la jurisprudence ait parfois eu une conception quelque peu extensive de la notion de bâtiment (à propos d’un ensemble composé d’un mur et d’un portail : CE 13 mars 1992, Association de sauvegarde de Chantilly, Dr. adm. 1992, comm. n° 215).
D’autres dispositions tendaient d’ailleurs à confirmer que le permis de démolir s’impose dès lors que les travaux de démolition projetés constituent une construction.
Il résulte à titre d’exemple de l'article R. 421-4 du Code de l’urbanisme que les lignes électriques et les canalisations constituent des constructions, lesquelles sont toutefois dispensées de toute formalité si elles sont souterraines.
Précisément, l'article R. 421-29 dispense pour sa part de permis de démolir, les démolitions de lignes électriques et de canalisations ; c'est donc bien qu’à défaut d'une telle dispense, la démolition de lignes électriques et de canalisations auraient pu être assujettie à permis de démolir puisqu'elles constituent des constructions au sens de l’actuel article L. 421-3 du code de l’urbanisme.
Mais chose quelque peu curieuse, l’article R.431-21 du Code de l'urbanisme, relatif aux pièces à fournir à l'appui des demandes d'autorisation, précise lui que « lorsque les travaux projetés nécessitent la démolition de bâtiments soumis au régime du permis de démolir, la demande de permis de construire ou d'aménager doit : soit être accompagnée de la justification du dépôt de la demande de permis de démolir ; soit porter à la fois sur la démolition et sur la construction ou l'aménagement » et, en d’autres termes, se réfère à la notion de bâtiment et non pas…
L’engagement d’une partie des travaux dans le délai prévu par l’article R.424-17 du Code de l’urbanisme interrompt en toute hypothèse ce délai pour l’ensemble de l’autorisation obtenue
Dès lors que l’ensemble des constructions projetées ont été autorisées par un seul et même permis de construire, l’engagement d’une partie des travaux interrompt le délai de validité de cette autorisation dans son ensemble et ce, quelle que soit la divisibilité des constructions projetées.
TA. Versailles, 30 juin 2011, SARL Batival, req. n°08-07765 (jugement n°16 cité par la lettre n°11.pdf du TA de Versailles : si quelqu’un dispose d’une copie de celui-ci, il va sans dire que je suis preneur…)
Nous avons ici déjà souvent traité des questions se rapportant à la notion d’ouvrages et d’ensembles immobiliers indivisibles. L’un des aspects des conséquences de la divisibilité du projet et de celle subséquente du permis de construire s’y rapportant est cependant moins connu : le délai de validité de cette autorisation et sa propension à être frappée de caducité partielle.
Concrètement la question ainsi posée est de savoir si l’exécution d’une partie divisible d’un projet relevant d’un permis de construire unique interrompt ou non le délai de validité de cette autorisation pour son tout ou seulement pour sa partie mise en œuvre dans le délai fixé par l’article R.424-17 du code de l’urbanisme dont on rappellera qu’il dispose « le permis de construire, d'aménager ou de démolir est périmé si les travaux ne sont pas entrepris dans le délai de deux ans à compter de la notification mentionnée à l'article R. 424-10 ou de la date à laquelle la décision tacite est intervenue. Il en est de même si, passé ce délai, les travaux sont interrompus pendant un délai supérieur à une année ».
A cet égard, il faut tout d’abord relever qu’à cet égard l’article précité n’est pas substantiellement différent de l’ancien article R.421-32 qui pour sa part disposait que « le permis de construire est périmé si les constructions ne sont pas entreprises dans le délai de deux ans à compter de la notification visée à l'article R. 421-34 ou de la délivrance tacite du permis de construire. Il en est de même si les travaux sont interrompus pendant un délai supérieur à une année ».
A ce titre, et dans un arrêt il est vrai ancien, le Conseil d’Etat a jugé, mais sans réelle précision sur ce point, que le délai de caducité du permis de construire autorisant l’édification de plusieurs bâtiments pouvait être interrompu par l’engagement des travaux sur n’importe quel d’entre eux, sans qu’il soit donc nécessairement besoin que les travaux portent sur la totalité du projet (CE. 10 décembre 1965, Synd. des copropriétaires de l’immeuble « Pharao-pasteur », Rec., p. 684). Dans le même sens, mais plus récemment, et à propos d’un permis de construire portant sur deux bâtiments distincts, la Cour administrative d’appel de Douai a déterminé le délai d’un an avant lequel les travaux d’édification du second bâtiment devaient être engagés par la seule référence à la date d’achèvement du premier (laquelle était postérieure à l’échéance du délai initial) et ce, sans autre considération (CAA. Douai, 14 juin 2001, SCI Séverine, req. n°97DA01664).
Toutefois,…
Modificatif de régularisation des permis groupés et annulation partielle des permis de construire valant division
Un permis de construire groupé délivré en méconnaissance de l’ancien article R.421-7-1 du Code de l’urbanisme ne peut pas être ultérieurement régularisé par un « modificatif » délivré sous l’empire de l’ancien article R.431-24 du Code de l’urbanisme. Partant, le vice affectant cette autorisation dans sa totalité est de nature à en emporter l’annulation globale.
CAA. Paris 4 novembre 2011, Société Murat Vazire, req. n°10PA02696
Dans cette affaire, la société appelante avait obtenu un permis de construire en vue de l’édification d’un ensemble immobilier comportant plusieurs bâtiments sur un terrain de 10.230 mètres carrés. Cette autorisation devait toutefois être contestée puis annulée par le Tribunal administratif de Paris au motif tiré de la méconnaissance de l’article R.421-7-1 du Code de l’urbanisme.
La société pétitionnaire devait toutefois interjeter appel de ce jugement en contestant l’assujettissement même de son projet à la procédure de permis de construire valant division ; assujettissement que confirma cependant la Cour administrative d’appel de Paris au terme d’une appréciation des caractéristiques du projet principalement fondée sur des critères rarement mis autant en exergue en la matière :
« considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le projet prévoit, sur un terrain d'assiette de 10 230 m², la construction par un seul maître d'ouvrage d'un ensemble immobilier comportant plusieurs bâtiments de R+5 à R+10 étages sur 3 et 4 niveaux de sous-sol, à usage d'habitation (211 logements dont 64 logements sociaux), d'une aumônerie, d'un hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD) comprenant 80 chambres ; que les immeubles comprenant 147 logements destinés à la vente, sont situés le long de la rue de Varize et du boulevard Murat et les immeubles comprenant 64 logements sociaux, et l'EHPAD sont situés au sud de la parcelle le long du boulevard Murat et de la rue du général Delestraint ; que ces deux groupes de bâtiments sont séparés par une allée traversant du nord au sud l'intégralité du terrain d'assiette et délimitant deux zones distinctes ; que, par ailleurs, le plan de repérage des clôtures prévoit des clôtures intérieures délimitant la partie du terrain affectée aux immeubles destinés à la vente comprenant des clôtures privatives pour les logements situés au rez-de-chaussée, la partie du terrain affectée à l'établissement destiné aux personnes âgées et la partie du terrain affectée aux immeubles destinés aux logements sociaux ; que l'organisation spatiale du projet s'organise ainsi autour d'unités fonctionnelles distinctes destinées à la vente, aux logements sociaux et à un établissement privé pour l'hébergement de personnes âgées ; qu'à la date des décisions contestées, le projet prévoyait ainsi, à tout le moins, de réaliser une division en propriété ou en jouissance de son terrain pour la partie affectée à l'établissement pour personnes âgées ; que, dès lors, le projet entrait dans le champ d'application des dispositions précitées de l'article R. 421-7-1 du code de l'urbanisme ».
Mais plus spécifiquement, la Cour devait implicitement rejeter la demande de la société appelante tendant à l’application de l’article L.600-5 du Code de l’urbanisme pour ce faisant prononcer l’annulation globale…
Sur le défaut de production au dossier de demande du titre habilitant à construire le pétitionnaire
Lorsque le titre habilitant à construire le pétitionnaire consiste en une promesse de vente conclue avec l’autorité compétente pour statuer sur la demande, le défaut de production de cette promesse au dossier produit par le pétitionnaire n’entache pas le permis de construire d’illégalité au regard de l’article R.421-1-1 du Code de l’urbanisme.
CE. 23 décembre 2011, Association pour la défense et la protection de la commune de Varaville, req. n°322.912
Voici un arrêt qui rendu pour application de l’ancien article R.421-1-1 du Code de l’urbanisme conserve néanmoins un intérêt au regard du régime applicable depuis le 1er octobre 2007.
Comme on le sait en effet l’article précité se bornait à disposer que « la demande de permis de construire est présentée soit par le propriétaire du terrain ou son mandataire, soit par une personne justifiant d'un titre l'habilitant à construire sur le terrain » et, par voie de conséquence, ne prescrivait pas lui-même que le pétitionnaire devait produire la preuve de ce titre à son dossier.
Pour autant, le Conseil d’Etat en avait cependant déduit qu’en dehors du cas où le pétitionnaire était le propriétaire du terrain à construire ou du moins en dehors du cas où l’administration était tenue de le regarder comme le « propriétaire apparent » dudit terrain, il incombait au pétitionnaire de produire au dossier une pièce établissant qu’il disposait bien d’un tel titre. Et compte tenu, d’une façon générale, du principe d’indépendance des législations et des procédures et, plus particulièrement, de l’objet et des effets du permis de construire dont il résulte que l’administration est réputée statuer pour ce qui concerne le projet au seul regard des pièces produites par le pétitionnaire, le défaut de production au dossier du titre habilitant à construire le pétitionnaire était en principe de nature à emporter à lui seul l’annulation du permis de construire délivré dans ces conditions.
Mais précisément, tel ne fut pas le cas dans cette affaire. En effet, si le pétitionnaire avait omis de produire son titre au dossier et si pour cette raison son permis de construire devait être annulé en première instance par le Tribunal administratif de Caen, le Cour administrative d’appel de Nantes devait pour sa part retenir une autre solution et ce, pour un motif ainsi confirmé par le Conseil d’Etat :
« considérant qu'aux termes de l'article R. 421-1-1 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction alors en vigueur : La demande de permis de construire est présentée soit par le propriétaire du terrain ou son mandataire, soit par une personne justifiant d'un titre l'habilitant à construire sur le terrain (...) ; que pour estimer que la SCI 1 bis rue Guillaume le Conquérant justifiait, pour l'octroi du permis de construire litigieux, d'un titre l'habilitant à construire sur le terrain d'assiette du projet, la cour a pu, sans erreur de droit, se fonder sur l'existence d'une promesse de vente conférant des droits à cette société mais ne figurant pas dans le dossier de demande de permis de construire, dès lors que cette…
Deux permis de construire sur un même terrain et à un même titulaire
Un second permis de construire délivré à titre unipersonnel à l’un des cotitulaires d’un premier permis de construire conjoint n’emporte pas le retrait implicite de cette première autorisation
CAA. Lyon, 4 janvier 2012, M. D… et Mlle A…., req 10LY01094
Voici un arrêt qui nous permet de revenir sur les contours de feu (?) la jurisprudence « Vicqueneau » et, plus généralement, sur la question relative à la possibilité d’obtenir deux permis de construire sur un même terrain.
Dans cette affaire, la commune de Saint-Jorioz avait d’abord délivré, le 29 septembre 2005, un premier permis de construire sollicité puis obtenu conjointement par M.X… et Mme Y, lequel devait toutefois être frappé d’un recours en annulation. Ultérieurement, un second permis de construire devait être délivré, le 8 novembre 2006, mais cette fois-ci uniquement au bénéfice de Mme Y.
Mais ce second permis de construire devait également être frappé d’un autre recours en annulation exercé par les mêmes requérants pour ainsi amener les parties défenderesses à invoquer la jurisprudence « Vicqueneau » et ainsi conclure au non-lieu à statuer sur la requête exercée à l’encontre du premier permis de construire délivré en 2005.
Deux observations doivent tout d’abord être formulées sur ce point.
D’une part, il faut préciser que le second du permis de construire avait été délivré le 8 novembre 2006. Même à considérer qu’il ait pu valoir retrait du précédent, il n’en demeurait pas moins que cette décision était antérieure à l’entrée en vigueur de l’alinéa 2 de l’article L.424-5 du Code de l’urbanisme, qui rappelons-le :
• dispose que « le permis de construire, d'aménager ou de démolir, tacite ou explicite, ne peut être retiré que s'il est illégal et dans le délai de trois mois suivant la date de cette décision. Passé ce délai, le permis ne peut être retiré que sur demande explicite de son bénéficiaire » ;
• a été clairement voulu (mais peut-être mois clairement rédigé…) pour mettre un terme à la jurisprudence « Vicqueneau » qui procédait du postulat selon lequel la demande se rapportant au second permis valait implicitement demande de retrait du premier.
L’article L.424-5 précité n’était donc pas applicable à la date de délivrance du second permis et, a fortiori, à la date de la seconde demande. Il s’ensuit que l’arrêt commenté ce jour ne saurait donc aucunement s’analyser comme un maintien de la jurisprudence « Vicqueneau ».
D’autre part, il faut d’ailleurs rappeler que la spécificité de la jurisprudence « Vicqueneau » au regard de la jurisprudence antérieure à cet arrêt tenait au fait qu’en toute hypothèse la délivrance du second permis de construire valait retrait définitif du premier, y compris en cas d’annulation du second.
Or, comme le sait, cette spécificité a disparu avec l’arrêt par lequel le Conseil d’Etat a jugé que « les conclusions aux fins d'annulation du permis initial ne deviennent sans objet du fait de la délivrance d'un nouveau permis qu'à la condition que le retrait qu'il a opéré ait acquis, à la date à laquelle…
Que reste-t-il du principe d’indépendance des procédures ?
La conformité des dossiers des demandes d’autorisation se rapportant à une opération indissociable doit s’apprécier globalement. Partant, les documents joints au dossier de l’une des demandes peuvent pallier les carences de l’autre.
CE.30 décembre 2011, Cne de Saint-Raphaël, req. n°342.398
Comme on le sait, le permis de construire a pour seul objet d’autoriser le projet de construction tel qu’il ressort du dossier de demande produit par le pétitionnaire.
Partant, non seulement l’administration statuant sur la demande doit prendre parti sur la totalité des aspects du projet sanctionnés par l’article L.421-6 du Code de l’urbanisme mais en outre, et pour ce qui concerne le projet en lui-même, l’administration est réputée statuer au seul vu des pièces du dossier de demande ; ce dont il résulte d’ailleurs qu’au-delà des informations et des pièces prescrites par les articles R.431-5 à R.431-33 du Code de l’urbanisme, il incombe au pétitionnaire de produire l’ensemble des pièces nécessaires pour que les services instructeurs puissent apprécier en toute connaissance de cause la conformité du projet aux normes d’urbanisme lui-étant opposable.
Si la régularité formelle du dossier de demande s’apprécie de façon globale, et non pas isolément pièce par pièce donc, il n’en demeure donc pas moins que les services instructeurs ne peuvent en principe prendre en compte que les pièces produites par le pétitionnaire et, a contrario, ne peuvent s’en rapporter à leur connaissance du projet et de son environnement, ni même se référer aux pièces produites dans un dossier présenté concomitamment ou, bien plus, précédemment (voir toutefois : CAA. Paris, 28 septembre 1999, M. B…, req. n°96PA02676). C’est ainsi que la Cour administrative d’appel de Marseille vient de très récemment juger que :
« Considérant qu'aux termes de l'article R.421-2 du code de l'urbanisme dans sa rédaction applicable à la date de la décision attaquée : A. Le dossier joint à la demande de permis de construire comporte : (...) 5° Deux documents photographiques au moins permettant de situer le terrain respectivement dans le paysage proche et lointain et d'apprécier la place qu'il y occupe. Les points et les angles des prises de vue seront reportés sur le plan de situation et le plan de masse ; 6° Un document graphique au moins permettant d'apprécier l'insertion du projet de construction dans l'environnement, son impact visuel ainsi que le traitement des accès et des abords. Lorsque le projet comporte la plantation d'arbres de haute tige, les documents graphiques devront faire apparaître la situation à l'achèvement des travaux et la situation à long terme (...). ;
Considérant que si le dossier de demande de permis de construire a pour objet principal de permettre à l'administration de procéder à l'instruction de la demande afin que le maire prenne sa décision en toute connaissance de cause, il doit également permettre aux tiers, grâce à sa composition complète, de prendre connaissance des éléments sur lesquels le maire a fondé sa décision, afin de pouvoir, le cas échéant, la contester ; que, par suite, la circonstance que le maire ait pu avoir connaissance…
Sur l’article L.424-5 du Code de l’urbanisme et l’échéance à respecter pour retirer une autorisation d’urbanisme
Les trois mois prévus par l’article L.424-5 du Code de l’urbanisme pour procéder au retrait des permis doivent être compris comme le délai ouvert à l’administration non pas seulement pour prendre mais également pour notifier l’arrêté de retrait au bénéficiaire de l’autorisation retirée. C’est également la seule notification de la décision portant retrait qui doit être prise en compte s’agissant des déclarations préalables. Partant, une demande de pièce complémentaire signée avant le délai ouvert à cet effet à l’administration mais notifiée après cette échéance au déclarant est nécessairement illégale.
CE. 13 février 2012, Association Protectrice des Animaux des Vannes, req. n°315.657/TA Amiens, 3 novembre 2011, req. n°10-02538
Dans cette affaire, l’association pétitionnaire avait acquis un permis de construire tacite qui devait toutefois lui être ultérieurement retiré. En conséquence, celle-ci décida d’exercer une requête aux fins de référé suspension à l’encontre de cette décision de retrait en invoquant l’illégalité de cette décision au regard de l’article L.424-5 du Code de l’urbanisme dès lors qu’elle lui avait été notifiée plus de trois mois après la formation de l’autorisation tacite ultérieurement retirée.
Il reste que ce moyen devait être rejeté par le juge des référés du Tribunal administratif de Rennes au motif que la décision de retrait avait bien été signée avant l’échéance dudit délai de trois mois. Le Conseil d’Etat devait toutefois censuré cette analyse au motif suivant :
« Considérant, d'autre part, qu'aux termes du second alinéa de l'article L. 424-5 du code de l'urbanisme : Le permis de construire, d'aménager ou de démolir, tacite ou explicite, ne peut être retiré que s'il est illégal et dans le délai de trois mois suivant la date de cette décision ; que, compte tenu de l'objectif de sécurité juridique poursuivi par le législateur, qui ressort des travaux préparatoires de la loi du 13 juillet 2006 dont ces dispositions sont issues, l'autorité compétente ne peut rapporter un permis de construire, d'aménager ou de démolir, tacite ou explicite, que si la décision de retrait est notifiée au bénéficiaire du permis avant l'expiration du délai de trois mois suivant la date à laquelle ce permis a été accordé ;
Considérant qu'à l'appui de sa demande de suspension de l'exécution de l'arrêté signé le 7 mars 2011 par lequel le maire de Theix a retiré le permis de construire tacite qui lui avait été accordé, l'association requérante faisait valoir que ce retrait était illégal, faute de lui avoir été notifié avant l'expiration du délai fixé par l'article L. 424-5 du code de l'urbanisme ; que, pour juger que ce moyen n'était pas de nature à faire naître un doute sérieux quant à la légalité de l'arrêté attaqué, le juge des référés du tribunal administratif de Rennes a relevé que la signature de cet arrêté était antérieure à l'expiration de ce délai et que la date de sa notification était sans incidence sur sa légalité ; qu'il résulte de ce qui vient d'être dit qu'il a, ce faisant, commis une erreur de droit ; que, par suite, et sans…
Sur l’instruction effective des demandes de permis de construire soumises à enquête publique
Si l’article R.424-20 du Code de l’urbanisme prévoit que le délai d’instruction d’une demande de permis de construire soumise à enquête publique court à compter de la remise du rapport du Commissaire enquêteur, cette circonstance ne s’oppose pas à ce que les avis des services à consulter soient sollicités et émis avant cette échéance.
CAA. Nancy, 28 juin 2012, Jean-Louis A… & autres, req. n°011NC01228
Voici un arrêt qui à défaut d’être fondamental d’un point de vue juridique s’avère particulière utile d’un point de vue pratique.
Dans cette affaire, le pétitionnaire avait présenté une demande de permis de construire portant sur l’implantation de deux éoliennes et soumise à enquête publique préalable dont le rapport fut remis 28 décembre 2008 avant que le permis de construire soit délivré le 24 février 2009.
Ce permis de construire devait cependant faire l’objet d’un recours en annulation fondé sur la circonstance que les services consulté sur le projet avaient émis leur avis avant la remise du rapport du commissaire enquêteur, et ce en méconnaissance selon eux de l’article R.423-20 du Code de l’urbanisme..
Pour autant, alors que ces avis avaient donc bien été recueillis avant ce moyen fut rejeté par la Cour administrative d’appel de Nancy au motif suivant :
« Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article R. 423-20 du code de l'urbanisme : " Par dérogation aux dispositions de l'article R. 423-19, lorsque le permis ne peut être délivré qu'après enquête publique, le délai d'instruction d'un dossier complet part de la réception par l'autorité compétente du rapport du commissaire enquêteur ou de la commission d'enquête. / Les dispositions de l'alinéa précédent ne sont pas applicables quand l'enquête publique porte sur un défrichement. " ;
Considérant que les requérants soutiennent que les dispositions précitées ont été méconnues en ce que l'ensemble des avis visés dans l'arrêté attaqué ont été émis avant l'avis émis par le commissaire enquêteur le 25 décembre 2008 ; que, toutefois, comme l'ont à bon droit estimé les premiers juges, les dispositions précitées ne font pas obstacle à ce que le service instructeur de la demande de permis de construire recueille auprès des personnes publiques, services ou commissions intéressés par le projet, les accords, avis ou décisions prévus par les lois ou règlements en vigueur antérieurement à la réception du rapport du commissaire enquêteur, ceux-ci n'étant pas conditionnés par le dépôt de celui-là ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées doit être écart ».
Dès lors que l’article R.423-20 allégué par les requérants ne comportait aucune disposition sur ce point, cette solution est pour le reste parfaitement logique dès lors que :
• d’une façon générale, la jurisprudence se borne en fait à exiger que les avis devant être recueillis soient émis entre le dépôt de la demande et la délivrance du permis de construire (CE. 6 juillet 1983, Sté l’Allobroge, req. n°38336 ; CE. 31 mai 1995, Cne de Sasset les Pins, req. n°121.012) ;
• plus spécifiquement, s’ils recouvrent de fait la…
Il n'est pas nécessaire d’avoir sollicité une adaptation mineure au stade de la présentation de la demande d’autorisation pour en revendiquer le bénéfice en cas de contentieux
La possibilité de bénéficier d’une adaptation mineure ne peut être écartée par le juge administratif au seul motif qu’elle n’a pas été demandée par le pétitionnaire.
CE. 13 février 2013, SCI Saint-Joseph, req. n°350.729
Dans l’affaire visée en référence, la SCI requérante avait obtenu un permis de construire dont l’exécution conforme devait toutefois être contestée et donner lieu à un procès-verbal d’infraction au motif que la hauteur de l’ouvrage réalisé dépassait celle prévue par cette autorisation.
Aux fins de régulariser ces travaux sur le plan administratif, la SCI présenta donc une demande de « modificatif », laquelle devait toutefois être rejetée au motif que les travaux objets de cette demande – ceux à régulariser – portait sur une construction excédant de 26 centimètres le plafond de hauteur fixé par l’article 10 du règlement de PLU applicable.
La SCI exerça un recours en annulation à l’encontre de cette décision de refus et à cette occasion, bien qu’elle ne l’ai pas demandé au stade de sa demande de « modificatif », invoqua le bénéfice de l’alinéa de l’article 123-1 alors applicable et, plus concrètement, fit ainsi valoir que ce dépassement de 26 centimètres constituait une adaptation mineure. Il reste que ce recours devait être rejeté par le Tribunal administratif de Nice dont le jugement fut ensuite confirmé par la Cour administrative d’appel de Marseille et ce, au motif suivant :
« Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 123-1 du code de l'urbanisme : (...) Les règles et servitudes définies par un plan local d'urbanisme ne peuvent faire l'objet d'aucune dérogation, à l'exception des adaptations mineures rendues nécessaires par la nature du sol, la configuration des parcelles ou le caractère des constructions avoisinantes (...) ; que si la société requérante soutient dans le cas où un dépassement de la hauteur autorisée serait retenu, que ce dépassement serait constitutif d'une adaptation mineure, il ressort des pièces du dossier qu'elle n'a pas demandé lors de l'instruction de son dossier à bénéficier de l'application de ces dispositions ; qu'en l'absence d'un traitement d'une telle demande par le service instructeur, elle n'est pas recevable à la présenter directement devant le juge ; que, dès lors, le moyen ne peut être qu'écarté» (CAA. Marseille 5 mai 2011, req. n°09MA01799. Voir également : CAA. Marseille, 20 décembre 2011, Cne de Rougiers, req. n°10 MA02646).
Mais pour sa part, le Conseil d’Etat devait donc juger que :
« Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la SCI Saint Joseph a soutenu devant la cour administrative d'appel de Marseille que le non-respect des règles de hauteur fixées par le plan local d'urbanisme, dont elle contestait, par ailleurs, la réalité, pouvait être regardé comme procédant d'adaptations mineures au sens de l'article L. 123-1 du code de l'urbanisme ; qu'il appartenait dès lors à cette cour, saisie de ce moyen, de se prononcer, par une appréciation souveraine des faits, sur le caractère éventuellement mineur de l'adaptation alléguée ; qu'en jugeant que la SCI Saint…
Régulariser par un permis de construire à l’identique un bâtiment volontairement démoli
L’article L.111-3 du Code de l’urbanisme ne s’oppose pas au droit de reconstruire à l’identique, en lieu et place d’une construction édifiée sans autorisation, un ancien bâtiment volontairement démoli par le pétitionnaire.
CAA. Lyon, 1er octobre 2013, M. B. A…, req. n°13LY00315
Dans cette affaire, le pétitionnaire avait antérieurement procédé à la démolition volontaire d’un bâtiment existant pour y édifier une nouvelle construction qu’il devait cependant bâtir sans avoir jamais obtenu l’autorisation requise ; raison pour laquelle il fut condamné à démolir cette seconde construction. C’est en raison de cette condamnation qu’il présenta une demande de permis de reconstruire à l’identique le bâtiment qu’il avait antérieurement démoli ; demande que le maire devait toutefois rejeter au motif que l’article L.111-3 du Code de l’urbanisme n’était pas applicable dès lors que, notamment :
• le bâtiment dont la reconstruction était envisagée avait été volontairement démoli ;
• et était projetée en lieu et place d’une construction illégalement édifiée ;
Comme on le sait, c’est la tempête du mois de décembre 1999 qui a conduit les parlementaires a adopté un amendement au cours des débats sur la loi « SRU » réactivant le droit de reconstruire à l’identique les bâtiments détruits par un sinistre ce, en l’instituant le principe – codifié à l’article L.111-3 du Code de l’urbanisme – selon lequel « la reconstruction à l'identique d'un bâtiment détruit par un sinistre est autorisée nonobstant toute disposition d'urbanisme contraire, sauf si la carte communale ou le plan local d'urbanisme en dispose autrement, dès lors qu'il a été régulièrement édifié ».
Si cet article ne définissait pas la notion de sinistre – laquelle n’était définie ni par les dispositions législatives ou règlementaires du code de l’urbanisme, ni d’ailleurs par aucune disposition issue d’une autre législation – il ressortait de la jurisprudence rendue à la matière qu’elle ne pouvait s’entendre que de tout événement fortuit n’étant pas directement ou indirectement imputable au maître d’ouvrage, tel à titre d’exemple :
• d’un événement climatique, telle une tempête (CA. Colmar, 12 avril 2001, Cne de Wolfisheim), une inondation ou un orage de grêle (CAA. Marseille, 27 novembre 2008, Hubert X., req. n°06MA01763) ;
• d’un phénomène physique, telle une avalanche ou la chute d’un arbre (TA. Pau, 23 octobre 2003, Didier Seguette, req. n°01-02170) ;
• d’un accident, tel un incendie (CE. 20 février 2002, Plan, req. n°235.725 ; CAA. Bordeaux, 21 novembre 2005, Mme Silvana Assier de Pompignan, req. n°02BX01600) ;
• d’un fait de l’homme volontaire, tel un attentat (CE. 5 mars 2003, Nicolas Lepoutre, req. n°252.422 ; CAA. Marseille, 30 mars 2006, Préfet de Corse du Sud, req. n°03MA01362).
Mais qu’en revanche, la démolition de l’immeuble, même résultant de l’exécution de travaux sur celui-ci ne semblait pas constituer un sinistre au sens de l’article L.111-3 du code l’urbanisme, que cette démolition soit volontaire ou non (CAA. Versailles, 15 janvier 2009, SCI GGMF, req. n°06VE02562. Voir toutefois, car plus ambigu : CAA. Marseille, 6 janvier 2009, Gérald X, req. n°06MA03381).
Il reste que la condition…
Quelle est la date à retenir pour apprécier si la demande a abouti à la formation d’un permis de construire tacite ?
En toute hypothèse, et sauf à relever des exclusions prévues par les articles R.424-2 et R.424-3 du Code de l’urbanisme, la demande abouti(rai)t à la formation d’un permis tacite à l’issue du délai d’instruction mentionnée dans le récépissé du dépôt de la demande, quand bien même ce délai serait-il erroné au regard des dispositions de droit commun effectivement applicables à la demande au titre de l’article R.423-23.
CAA. Marseille, 12 décembre 2013, Cne de Frontignan, req. n°11MA02145
Voici un arrêt qui traite d’une question n’ayant à ce jour donné lieu qu’à peu de jurisprudences et dont la réponse à y apporter n’est pas si évidente comme en témoigne d’ailleurs le caractère contradictoire des arrêts rendus en la matière : la date à laquelle né un permis tacite est-elle celle correspondant à l’issue du délai d’instruction tel que mentionné le cas échéant à tort dans le récépissé de la demande ou à l’expiration du délai tel qu’effectivement applicable à la demande au regard de la nature du projet sur lequel elle porte ?
Dans cette affaire, le pétitionnaire avait d’abord présenté une demande de permis de construire portant sur la création d’une unité d’habitation comportant six logements pour une SHON totale de 353 mètres carrés, laquelle devait toutefois donner lieu à un refus motivé selon toute vraisemblance par le nombre de logements ainsi prévus ou plus précisément peut-être en raison du fait que le bâtiment à construire ne pouvait ainsi pas être apparenté à une maison d’habitation.
C’est la raison pour laquelle le pétitionnaire formula ensuite une demande de permis de construire un bâtiment de 336 mètres carrés quasi-similaire à celui objet de sa précédente demande mais cette fois-ci déclaré en tant que maison individuelle ; laquelle devait toutefois faire à nouveau l’objet d’un refus de permis de construire.
Mais cette fois-ci le pétitionnaire devait donc exercer un recours en annulation à l’encontre de ce refus en faisant notamment valoir que ce dernier emportait en fait le retrait du permis de construire tacite auquel avait abouti sa seconde demande au terme d’un délai de deux mois à compter du dépôt de celle-ci.
Il reste que si la commune avait également rejeté cette seconde demande, c’est dans la mesure où elle suspectait que sous couvert d’un bâtiment déclaré en tant que maison individuelle le projet du pétitionnaire consistait en réalité en un immeuble d’habitation collective ; raison pour laquelle elle soutenu que le délai applicable à la demande était de trois mois.
Mais outre que rien n’établissait que tel fut effectivement la réalité du projet du pétitionnaire, le récépissé de la seconde demande mentionnait un délai d’instruction de deux mois ; délai qui ne fit jamais l’objet d’une majoration régulièrement notifié au pétitionnaire. C’est la raison pour laquelle la Cour administrative d’appel de Marseille devait donc retenir ce moyen en jugeant que :
« 6. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article R. 423-19 du code de l'urbanisme : " Le délai d'instruction court à compter de la réception en mairie d'un…
Hauteur de la construction & champ d’application de la déclaration préalable
Pour l’application de l’article R.421-9 du Code de l’urbanisme dans sa rédaction en vigueur antérieurement au 1er mars 2012, les constructions d’une hauteur supérieure supérieur à 12 mètres ne relèvent du champ d’application de la déclaration préalable que pour autant que leur SHOB soit inférieure à 2 mètres carrés. Partant, saisi d’une déclaration se rapportant à une installation d’une hauteur de plus de douze mètres et d’une SHOB certes inférieure à 20 mètres carrés mais néanmoins supérieure à 2 mètres carrés, l’autorité compétente doit en toute hypothèse s’opposer à cette déclaration.
CE. 9 juin 2014, Cne de Chelles, req. n°373.295
Voici un arrêt dont l’un des apports a trait à un dispositif n’étant certes plus en vigueur depuis le 1er mars 2012, et a d’ailleurs depuis été simplifié ou à tout le moins clarifié par le décret du 28 février 2012, mais qui conserve néanmoins un intérêt puisqu’outre qu’il est susceptible de concerner des instances encore en cours, il illustre la règle selon laquelle les items définissant le champ d’application de la déclaration préalable, comme les constructions dispensées de toute formalité, doivent être appliqués indépendamment les uns des autres puisqu’ils constituent tous une exception à la règle selon laquelle une construction nouvelle est en principe soumise à permis de construire ; cet arrêt précisant également et plus généralement quelle décision doivent prendre les services instructeurs saisis d’une déclarations se rapportant à un projet relevant du champ d’application du permis de construire.
Dans cette affaire, une déclaration préalable de travaux avait été formulée en vue de la création d’une installation de plus de 12 mètres de hauteur et d’une SHOB de 8,50 mètres carrés, laquelle était donc comprise entre 2 et 20 mètres carrés.
Il reste que le Maire devait s’opposer à cette déclaration pour un motif de fond que devait censurer le Tribunal administratif.
Il reste que le Conseil d’Etat a donc censuré ce jugement et validé non pas son mon motif propre mais la décision d’opposition du maire dans la mesure où :
« Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la déclarationpréalable déposée par la société Orange France le 18 octobre 2011 avait pour objet la construction d'une antenne relais de téléphonie mobile composée, d'une part, d'un pylône de 24 mètres et, d'autre part, d'un local technique, d'une surface de plancher de 8,50 mètres carrés, indissociable du pylône ; que, par suite, le projet de la société Orange France devait faire l'objet d'un permis de construire ; que, dès lors, le maire de Chelles était tenu, ainsi qu'il l'a fait, de s'opposer aux travaux déclarés ; qu'il s'ensuit que le tribunal administratif a commis une erreur de droit en se fondant, pour annuler l'arrêté par lequel le maire de Chelles s'est opposé aux travaux déclarés, sur un moyen qui ne pouvait qu'être écarté comme inopérant ; que son jugement doit, en conséquence et sans qu'il soit besoin d'examiner les moyens du pourvoi, être annulé »
et donc au seul et unique motif…
Premières précisions sur le régime contentieux du permis de construire valant autorisation d'exploitation commerciale

L'annulation de l'autorisation d'exploitation commerciale dont tient lieu le permis de construire délivré au titre de l'article L.425-4 du Code de l'urbanisme s'oppose à la réalisation du projet, laquelle implique en toute hypothèse un nouveau permis de construire, le cas échéant sans réinstruction mais au seul vu d'un nouvel avis favorable de la commission départementale d'aménagement commercial compétente ou de la commission nationale.
Un permis de construire peut-il être entaché de fraude à raison d'un acte accompli par un tiers et non pas par le pétitionnaire lui-même ?

Lorsqu'après un retrait de permis de construire motivé par la méconnaissance de l'article 13 du POS, le vendeur du terrain à construire présente lui-même une déclaration d'abattage d'arbres avant qu'ultérieurement le pétitionnaire représente une nouvelle demande de permis de construire présentant le terrain comme dépourvu de toute plantation, l'autorisation ainsi obtenue s'en trouve entachée de fraude. Ce vice ne peut en outre pas être régularisé par un "modificatif" au titre de l'article L.600-5-1 du Code de l'urbanisme .
Tous les accès au même terrain doivent-ils respecter les prescriptions du PLU relatives à la desserte ?

Sauf disposition expresse du règlement, un terrain est constructible dès lorsqu'il présente un accès adapté à la desserte du projet au regard de l'article 3 du règlement de PLU applicable. Partant, la circonstance qu'il présente d'autres accès pour leur part non conforme aux prescriptions de cet article n'a pas d'incidence et ne saurait justifier un refus de permis construire.
Qu'est-ce que le terrain dans le cas d'un permis de construire portant sur deux unités foncières distinctes ?

Dans la mesure où il n'incombe pas aux services instructeurs de vérifier la qualité du pétitionnaire à l'égard des parcelles constituant l'assiette de la demande de permis de construire, cette assiette forme une seule et même unité foncière apparente, laquelle constitue le terrain au sens des dispositions du PLU applicable. Partant, dans le cas d'un permis de construire portant sur deux unités foncières, la limite séparant ces deux terrains au sein de l'assiette de la demande de permis de construire ne constitue(rait) pas une limite séparative au sens des règles d'implantation prescrites par l'article 7 du PLU ; l'implantation des constructions sur ce tènement relevant alors de l'article 8 de ce règlement. En résumé, l'accord du voisin pour déposer la demande notamment sur sa parcelle vaut servitude de cours communes (à comparer à ça).
La servitude de cours communes ne doit pas nécessairement être signée et avoir pris effet à la date de délivrance du permis de construire
Il résulte de l'article R.431-32 du Code de l'urbanisme que lorsque l'institution d'une servitude de cours communes est requise pour l'édification d'une construction, le permis de construire autorisant cette construction ne peut être délivré par l'autorité administrative sans qu'aient été fournis par le pétitionnaire, dans le cadre de sa demande, les documents justifiant de ce qu'une telle servitude sera instituée lors de l'édification de la construction projetée. Mais ces dispositions n'imposent pas que la servitude ait été établie et soit entrée en vigueur avant que le permis de construire ne soit délivré. La production d'un projet de contrat précis et l'engagement du pétitionnaire et du propriétaire peuvent ainsi suffire.
Caducité du permis : comment se calcul le délai d'un an d'un pour reprendre les travaux dans le cas d'un permis obtenu avant le 1er octobre 2007 mais ayant bénéficié de la majoration du décret du 19 décembre 2008

Même dans le cas d'un permis de construire obtenu avant le 1er octobre 2007 et l'entrée en vigueur de l'article R.424-17 du Code de l'urbanisme, le délai d'un an pour reprendre les travaux court à compter de la date d'expiration du délai de validité initial de deux ans prévu par cet article, le cas échéant exceptionnellement majoré d'un an, en l'espèce en application du décret du 19 octobre 2008, et non pas selon les modalités découlant de l'article R.421-32 du Code de l'urbanisme en vigueur à la date de délivrance du permis de construire, y compris donc si les travaux ont été interrompus avant cette date.